5 femmes issues des Outre-mer récompensées par le Prix L’Oréal – UNESCO, pour les femmes et la science 2020
Deux chercheuses de Nouvelle-Calédonie, deux originaires de Martinique, et une chercheuse de Saint-Martin, ont été récompensées ce jeudi 1er octobre par le jury de la Fondation L'Oréal, associée à l'UNESCO. Un Prix prestigieux qui se veux être un moteur de l'égalité homme-femme dans le secteur de la recherche scientifique.
2 octobre 2020 à 9h52 par Arnaud Joly
Le Prix Jeunes Talents France L’Oréal-UNESCO pour les femmes et la Science, vise à récompenser chaque année de jeunes chercheuses à travers le monde. Un jury de sélection de l’Académie des sciences couronne 20 doctorantes et 15 post-doctorantes en France leur permettant l’obtention d’une bourse de recherche d’un montant de 15 000 euros pour les doctorantes, et 20 000 euros pour les post-doctorantes. Ces scientifiques bénéficieront également d’un programme de formation au leadership, complémentaire à leur parcours scientifique, dans un milieu ou près de 90 % des postes à responsabilités dans le secteur de la recherche sont occupés par des hommes.
Depuis sa création en 1998, le programme L’Oréal-UNESCO Pour les Femmes et la Science a accompagné et mis en lumière plus de 3 000 femmes scientifiques.
Nouvelle-Calédonie
Issue d’une tribu kanak de l’île de Lifou en Nouvelle-Calédonie, Cynthia Sinyeue réalise actuellement une thèse à l’Institut des Sciences Exactes et Appliquées de l’Université de la Nouvelle-Calédonie. Son enfance, passée sur cette île, la sensibilise à la protection de l’environnement et aux mécanismes qui se jouent dans la nature qu’elle décrit comme surprenants et fascinants. Cynthia Sinyeue considère que « la science est le cœur d’une civilisation en constante évolution ».
Elle en tire sa curiosité, son émerveillement et le sens de ses combats. Aujourd’hui, ses travaux de recherche sont dédiés à la valorisation des résidus de bois en Nouvelle-Calédonie, particulièrement celle des molécules utiles à la lutte contre les maladies. Initié par sa thèse, elle souhaite que ses recherches puissent contribuer à apporter des solutions naturelles à la fois au traitement du cancer et au réchauffement climatique, deux problématiques qui touchent au cœur son île natale.
C’est lors d’un voyage familial à Djibouti en mer Rouge, que Valentine Meunier a nagé pour la première fois au milieu des récifs coralliens. Elle a été fascinée par leur beauté et leur complexité. Prenant conscience de leur rôle essentiel dans l’écosystème marin tropical, c’est naturellement qu’elle décide par la suite de s’engager dans leur protection et de leurs consacrer ses recherches. Après un master de Biologie Marine à l’Université Pierre et Marie Curie à Paris, c’est en Nouvelle-Calédonie que le voyage se poursuit. Les coraux calédoniens ont la chance de n’avoir subi qu’un seul épisode de « blanchissement » – un phénomène menant au déclin des récifs coralliens et qui ne cesse de se répéter et de s’intensifier avec le réchauffement climatique.
La biologiste et ses deux directrices de recherche ont mis en évidence pendant un épisode de blanchissement, que les coraux se nourrissaient davantage de plancton diazotrophe, une espèce abondance en Nouvelle-Calédonie et particulièrement riche en azote. Leur résistance au stress causé par un changement de température en était grandement améliorée. Cette nouvelle connaissance représente un véritable espoir pour la conservation des récifs coralliens et pour plus de 600 millions de personnes dans le monde vivant dans des zones côtières protégées par les récifs.
Martinique
Aurélie Boisnoir habite Ducos et est originaire de la commune de Le François. Elle réalise un post-doctorat à l’Ifremer Martinique sous la direction de Nicolas Chomérat et Jean-Pierre Allenou. Ses travaux ambitionnent de faire avancer la recherche sur les dinoflagellés benthiques toxiques – des microalgues présentes en mer des Caraïbes (Saint Martin, Saint Barthélémy, Guadeloupe, Martinique) . Ces dernières occasionnent des problèmes sanitaires et économiques dans la région qui finissent par émerger dans les zones tempérées. Pourtant, à ce jour, peu d’études récentes s’étaient intéressées à leur identification génétique ou à la caractérisation de leurs toxines. C’est chose faite avec les travaux d’Aurélie Boisnoir.
Jordane Corbeau habite Le Carbet. Passionnée par les sciences de la vie et de la terre, Jordane CORBEAU décide très rapidement de se dédier aux géosciences. Au gré des enseignements reçus et de ses différents stages, elle se spécialise en géophysique et en sismologie. Dans le cadre de ses travaux de thèse, elle découvre la région des Caraïbes. Elle s’intéresse plus particulièrement à Haïti après le terrible tremblement de terre qui secoua l’île en janvier 2010, à la recherche de la compréhension de la dynamique des frontières de plaques tectoniques.
Saint-Martin
Originaire de Saint-Martin, Stéphanie Jacquet quitte son île natale des Caraïbes dans le but de poursuivre des études supérieures à Montpellier afin de devenir enseignante. Fascinée par la richesse des mécanismes employés par les parasites pour se répliquer et se transmettre d’un hôte à l’autre, elle décide de s’orienter vers une carrière de recherche scientifique pour étudier les interactions qui régissent le monde du vivant.
La chercheuse se spécialise alors dans l’étude et la compréhension des processus écologiques, évolutifs et moléculaires qui façonnent les interactions entre hôtes et parasites. Dans sa thèse, elle démontre notamment que certains facteurs environnementaux, comme le vent ou la mer, et des facteurs écologiques, comme le mode de dispersion ou encore le cycle de vie, ont un impact sur l’aire de distribution d’un type de moucheron qui est le vecteur principal d’une maladie bovine.
Ses travaux les plus récents visent à comprendre comment les chauves-souris, hôtes de nombreux pathogènes transmissibles à l’Homme, coexistent avec les virus. Pour cela, elle étudie la diversité génétique et fonctionnelle de leur système immunitaire inné, à savoir les mécanismes cellulaires permettant la défense des chauves-souris contre les virus, comparativement à d’autres mammifères. Stéphanie Jacquet a mis en évidence certaines caractéristiques génétiques spécifiques aux chauves-souris qui contribueraient à leurs défenses antivirales uniques.